Gabriel Massou sur le maintien des services publics dans les quartiers populaires

Monsieur le Préfet,
Le Président de la République déclarait le 15 novembre dernier à propos de la politique de la ville : « Ces quartiers ont droit à la même réussite que les autres, ils ne me demandent pas d’ailleurs de l’aide, des subventions, des contrats de seconde zone, des dispositifs spécifiques, ils veulent qu’on leur apporte la possibilité d’accéder à la même chose que les autres. Quand la République et toutes ces politiques publiques ne sont pas au rendez-vous, il n’y a pas de vrai redressement moral, indispensable pour les quartiers les plus en difficulté ». C’était il y a sept mois.
Sept mois plus tard, je vais vous parler de quartiers où non seulement la présence publique s’affaiblit, mais est en voie de disparition : effectifs des commissariats qui diminuent, antennes postales qui ferment, services de la Caisse primaire d’assurance maladie qui se délocalisent, centres des impôts menacés de fermeture… C’est la situation notamment à Bagneux, Colombes, Villeneuve-la-Garenne… je pourrais allonger la liste.
Mais c’est aussi dans cette dernière ville, que je connais bien, puisque c’est ma ville, sous la pression des choix financiers nationaux, et notamment ceux de l’Agence Régionale de Santé (ARS), le service de radiologie qui a fermé à l’Hôpital Nord, le service des consultations sans rendez-vous qui va s’arrêter en juin…
Monsieur le Préfet, après ces exemples, ma première question est : quelles sont les actions concrètes des services de l’État pour que les paroles du Président ne soient pas que des mots, à savoir « permettre aux quartiers populaires d’accéder à la même chose que les autres »?
Toujours dans le même discours, le Président disait : « Je voudrais aussi tordre le cou à une idée qui, en ce moment, fait fureur, c’est qu’il y aurait en quelque sorte une politique économique ambitieuse pour les gens qui réussissent, et puis, que quand on vient dans les quartiers en difficulté, on viendrait parler d’une politique sociale, parce que les gens des quartiers n’auraient pas droit à la politique économique. Je ne sais pas ce que ça veut dire, moi, avoir une politique pour les riches, je sais simplement que quand il n’y a pas une économie qui tire tout le pays en avant, quand il n’y a pas des entrepreneurs qui réussissent, quand il n’y a pas des gens qui réinvestissent dans l’économie, les quartiers les plus en difficulté ne se portent pas bien ».
Sept mois plus tard, toujours à Villeneuve-la-Garenne, la Poste annonce la fermeture de sa Plateforme Industrielle Courrier ouverte il y a sept ans, après regroupement des services d’Issy-les-Moulineaux et de Nanterre, suite à un investissement de 70 M€ sur un site regroupant quatre cents salariés. Vous me direz : « Quel rapport avec les services de l’État ? » Et je me permets de vous rappeler que dans le contrat d’entreprise signé entre la Poste et l’État, en janvier 2018, quatre missions de service public y sont présentes dont la contribution à l’aménagement du territoire.
Ma question est assez simple : qu’entendent faire les services de l’État face à la volonté du groupe La Poste de sacrifier un site implanté dans un territoire politique de la ville ? Ou alors ce sont des choix d’aménagement que je ne comprends pas.
Monsieur le Préfet, je vous remercie de votre écoute, mais vous comprendrez que ce que les populations attendent, ce sont d’abord des actes concrets stoppant la disparition de nombreux services publics des quartiers les plus sensibles et les plus populaires.

Marie-Hélène sur l’évolution des critères prioritaires pour l’hébergement d’urgence des personnes sans domicile

Monsieur le Préfet,
Depuis le début du mois de mai, vous avez défini de nouveaux critères prioritaires pour l’hébergement par le 115 des personnes sans domicile, donnant la priorité aux femmes enceintes, familles avec un enfant de moins de 3 ans et femmes victimes de violence.
Plusieurs dizaines de familles ont, ainsi, reçu une information leur indiquant que leur hébergement cesserait d’ici la fin du mois de juin et qu’elles devaient rechercher une solution par elles-mêmes.
Monsieur Le Préfet, par un courrier datant du 25 mai, mon Groupe vous alertait sur cette situation et vous demandait d’intervenir pour qu’aucune expulsion ne soit effectuée, le temps qu’une proposition de relogement soit proposée aux personnes concernées, quitte à réquisitionner des logements ou des bureaux vides.
Il est, en effet, inconcevable pour nous que des personnes, des familles avec enfants mineurs se retrouvent à la rue du jour au lendemain.
Ceci, alors même qu’elles se sont trouvées placées par vos services dans des hôtels, faute de propositions de relogement pérennes.
Ainsi, le 30 mai dernier, lors d’une audience avec une délégation composée d’élus dont Elsa Faucillon, Députée et Conseillère départementale des Hauts-de-Seine et de responsables associatifs, votre Directeur de cabinet pointait le manque de logement et de centres d’hébergement afin d’accompagner les personnes placées en hôtel.
Cette situation est critique dans les Hauts-de-Seine :
  • environ cinq cents personnes se retrouvent sans hébergement suite aux nouveaux critères du 115 ;
  • sur les trente-six villes des Hauts-de-Seine – nous en avons déjà parlé –, vingt-deux sont en dessous des 25 % de logements sociaux fixés par la loi SRU et neuf sont carencées ;
  • en 2016, nous n’avions que mille six cent treize places en hébergement tout confondu (CHU, CHRS, Accueil temporaire) ;
  • le nombre d’appels au 115 est en hausse de 60 % entre 2015 et 2016. Cinq mille huit cent vingt-six demandes de mise à l’abri n’ont pas trouvé de solution par le 115, soit mille cent quatre-vingt-seize personnes ;
  • et un dernier chiffre : 41 % des personnes mises à l’abri sont des enfants.
Je vous laisse imaginer les conséquences des nouveaux critères qui viennent d’être mis en place.
Je me permets aussi d’ajouter une remarque sur le rôle du Département et ses compétences obligatoires : le Département des Hauts-de-Seine ne respecte pas l’arrêté d’avril 2018 du Conseil d’État qui l’oblige à prendre en charge l’hébergement d’urgence des femmes enceintes et femmes avec enfants de moins de 3 ans. En effet, une délibération est présentée qui démontre qu’il n’y a que trente-huit places d’hébergement pour ces publics fragiles sur l’ensemble du département au Centre Maternel des Marronniers à Châtillon, alors que ce sont plus de trois cents familles qui sont concernées.
Monsieur Le Préfet, je souhaiterais donc, aujourd’hui, connaître les mesures que vous comptez mettre en place en urgence et sur le long terme afin que l’État remplisse sa responsabilité de protection notamment vis-à-vis de populations vulnérables et son rôle de police administrative pour carence des compétences obligatoires du Département. Je vous remercie.

Patrick Jarry sur l’ANRU

Monsieur le Préfet,
En 2014, le 2nd programme national de renouvellement urbain était lancé, avec 200 quartiers retenus au titre d’opérations d’intérêt national et un budget de 5 milliards d’euros annoncé. Dans les Hauts-de-Seine, six quartiers doivent bénéficier de ces opérations, à Asnières-sur-Seine, Gennevilliers, Bagneux, Colombes, Villeneuve-la-Garenne et Nanterre ; et quatre autres quartiers, d’opérations d’intérêt régional.
Huit villes sont concernées, qui ont beaucoup travaillé à construire des projets permettant de redonner à ces quartiers toute l’attractivité et le dynamisme dont ils ont besoin pour que leurs habitants reprennent espoir. Pour chacune d’entre elles, des protocoles de préfiguration ont été signés avec l’État et l’ANRU.
Monsieur le Préfet, nous souhaitons aujourd’hui connaître l’état d’avancement précis de ce programme dans les Hauts-de-Seine, et savoir quelles sommes y seront consacrées.
En effet, à ce jour, une certaine inquiétude persiste sur cette question du financement. Le discours tenu par Emmanuel Macron le 22 mai dernier au sujet du plan Borloo pour l’avenir des banlieues, dont il n’a quasiment rien retenu, n’a pas contribué à rassurer les élus. En matière de rénovation urbaine, bien qu’il ait promis de porter à dix milliards d’euros le budget de l’ANRU, seuls quelques millions ont été inscrits au budget de l’État en 2018.
Le nouveau règlement intérieur de l’ANRU a été adopté et transmis aux villes il y a quelques jours, mais le « scoring » qui sera appliqué à chaque projet n’est toujours pas annoncé. Dans certaines villes, des montants ont été évoqués, dont certains paraissent d’ailleurs faibles au regard des ambitions des projets. D’autres ne savent rien pour le moment. Et à ma connaissance, aucun engagement ferme n’a été pris à ce stade.
Par ailleurs, les bailleurs sociaux, partenaires financier incontournables des projets, ont vu leurs fonds propres sérieusement attaqués par la baisse des APL, qu’on leur a demandé de compenser en réduisant les loyers. L’Office municipal d’ HLM de Nanterre, par exemple, dispose cette année de 1 700 000€ de loyers en moins. Au niveau national, certains bailleurs remettent ainsi en cause leur participation au plan, faute de fonds suffisants pour les mener dans de bonnes conditions.
Dans ce contexte, nombreux sont les élus qui font preuve d’une certaine prudence sur la suite du processus ; qui les conduit à demander des actes concrets en guise de garantie. Ils ont aujourd’hui besoin d’engagements fermes et chiffrés, tant vis-à-vis des partenaires des projets que des habitants, chez qui les attentes sont fortes.
Monsieur le Préfet, quel est le calendrier de signature des conventions définitives, comprenant ces engagements financiers ? Quelles sont vos instructions en matière de financement des projets ? Les bailleurs sociaux, éreintés par la baisse des APL, bénéficieront-ils des financements suffisants pour procéder à des opérations de démolition-construction ?
Autant de questions auxquelles nous espérons recevoir des réponses précises, à même de lever nos inquiétudes, et de nous donner la visibilité dont nous avons besoin. Je vous remercie.